lundi 27 septembre 2021

171 – La gestion mentale au cœur même de la classe. Témoignages.

J'ai lancé il y a quelques temps un appel à coopération en vue de la réalisation soit d'un site internet dédié soit d'un ouvrage papier, en direction des enseignants de toutes disciplines * et de tous les niveaux d'âge. Mon intention est de compléter les ouvrages déjà édités, Accompagner le travail des adolescents (2009, pour les adultes accompagnants en général) et J'apprends à travailler (2018, pour les jeunes eux-mêmes), avec un troisième opus destiné spécifiquement aux enseignants dans leurs pratiques de classe. N'étant pas enseignant moi-même, j'ai fait appel à des ami(e)s professeurs dont je sais qu'ils utilisent la gestion mentale dans leurs classes depuis plusieurs années - et avec bonheur ! - et que cette approche mentaliste de la vie de la "conscience connaissante" a profondément bouleversé leur regard sur leurs élèves donnant à leurs pratiques professionnelles une tout autre visée de sens.

J'ai déjà publié le témoignage de l'une d'entre eux dans mon message précédent 170 -Une séance d'accompagnement personnalisé en lycée avec la gestion mentale. Mais, il s'agit là d'une aide à l'apprentissage en dehors du cours lui-même, et donc pas d'une pratique spécifique de transmission de savoirs. Il faut s'approcher encore davantage du coeur même du métier d'enseignant : la transmission des savoirs.

Aujourd’hui, je mets en ligne deux autre témoignages concernant directement la pratique en classe. Ils émanent d’un enseignant d’histoire-géographie en collège, Mikel Erramouspé, et de l’un de ses collègues en EPS. 

Mikel Erramouspé, tout jeune retraité, a été directeur de plusieurs collèges privés du Pays basque. Il a fortement contribué à implanter la gestion mentale dans les établissements dont il a animé les équipes professorales. Lui-même formateur labellisé et expérimenté en gestion mentale, et toujours actif au sein de l’Institut Supérieur de Formation de la Gironde, il est en effet un fervent défenseur de la réintroduction de la conscience au cœur des apprentissages dans le lieu même de la classe.

Voici les deux témoignages qu’il m’a envoyés (et qu'on pourra relier à tel ou tel point du texte du message 168 : La GM Attitude). Deux très beaux exemples (et non modèles...) d'attitude professorale inspirée par la Gestion mentale, à suivre sans modération et facilement adaptables à toutes les disciplines :

1. En classe histoire-géographie, sur le geste d’attention et de compréhension en classe... et la motivation des élèves.

En début de cours. L’enseignant fait rentrer les élèves en classe. Auparavant il a écrit une consigne au tableau. Exemple : je fais exister la carte de l’empire romain dans ma tête pour pouvoir la communiquer aux autres.

Le professeur se tait  et attend que les élèves s’installent à leur place ; il montre du doigt la consigne écrite au tableau.

Peu à peu les élèves rentrent en eux-mêmes. Les voilà en activité mentale. Les uns ferment les yeux et dessinent mentalement la carte, d’autres se parlent intérieurement…

Pendant ce temps le professeur observe, passe dans les rangs, encourage du regard ceux qui ont du mal à se lancer .

Un grand silence très habité s’est installé. Le prof n’a toujours pas ouvert la bouche.

Lorsqu’il sent que les élèves sont prêts, il leur donne la parole. Ceux-ci apportent le fruit de leur réactivation. Les uns racontent, d’autres décrivent, d’autres encore posent des questions.

Le professeur accueille, suscite le débat, encourage …

Puis il dit : "Je vais à présent vous montrer la carte et vous allez comparer avec ce que vous aviez dans la tête. Au bout de quelques minutes je vais l’enlever."

Le professeur se tait pour laisser les élèves travailler, puis enlève la carte.

Il donne la parole aux élèves qui  commentent, complètent ….

Il peut à présent continuer le cours dans un climat d’extrême attention, d’élèves actifs dans leur tête.

Il ménagera des pauses évocatives ** régulières  pendant le cours et n’oubliera pas 5 mn avant la fin de laisser du temps pour une nouvelle mise en projet  de réutilisation.

Cette activité ne se met pas en place facilement car les élèves n’y sont pas habitués. Mais il devient peu à peu un rituel. La mise au travail devient instantanée, le climat de classe paisible  et surtout, les apprentissages deviennent efficaces ! L’enseignant doit accepter que cela prenne du temps. Il peut, au départ,  avoir l’impression d’en perdre. Mais en fin d’année, le chemin parcouru est incomparable. Savoir perdre du temps pour en gagner.

Que l'on aimerait avoir (eu) de tels professeurs  ! Et quel formateur doit être Mikel !

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2. En cours d'EPS, sur l'ensemble des gestes mentaux, la communication à autrui et l'entraide... 

et la gestion de l'hétérogénéité, la motivation des élèves, l'argumentation... 

Dyades dissymétriques

Entendu au cours d’une journée d’échange de pratiques entre professeurs de Collège.

L’un des moteurs puissants des apprentissages est le projet de communication à et avec autrui. C’est le dernier rouage du "PEGASE"*** de Guy Sonnois. Comme lui, Patxi, professeur d’EPS en collège, a observé le manque de motivation de certains élèves, qu’ils soient bons ou moins bons. Ils travaillent ou font quelques efforts pour faire plaisir au prof … Le changement opéré par les dyades dissymétriques relève d’un changement de posture. Le projet est à présent de communiquer aux autres le fruit d’une expertise et, pour les autres, d’accepter de la recevoir.

A la fin d’une séquence, Patxi met les élèves en binôme. Celui qui a eu la meilleure performance avec celui qui a eu la plus faible, etc … 

Dans les 2 cas, les élèves doivent opérer un retour réflexif sur ses gestes à la fois mentaux et physiques. Il doivent faire travailler les gestes (mentaux) d’attention, de mémorisation, de compréhension… Pas de surprise donc qu'ils progressent.

Les binômes sont amenés à trouver des solutions. Pour cela il sont obligés de clarifier leur propos, de négocier, d’argumenter, d’observer, d'imaginer…

Patxi souligne à juste titre les nombreux avantages de cette pratique. Il démontre que l’hétérogénéité de la classe peut devenir un atout. Mis dans de telles situations tous les élèves progressent. 

En lisant le rapport de Patxi, on ne peut s’empêcher de penser aux obstacles qui se dressent à toutes les étapes des apprentissages, mais aussi aux solutions à inventer pour les surmonter.

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Plusieurs ouvrages ont déjà été publiés sur l'utilisation de la Gestion Mentale en classe, certains à partir de champs disciplinaires spécifiques : par exemple le Français à l'École avec Ch. Piganneaules Mathématiques en Collège pour A. Géninet, la  Physique en Lycée pour G. Gidrol ; d'autres plus généralistes : à L'École pour Ch. Pébrel, au Lycée et les grands Collégiens pour MF. Le Meignen (ouvrages épuisés mais on en trouve en occasion sur internet). On trouvera les références de ces ouvrages et de bien d'autres plus récents dans cette bibliographie exhaustive de l'IIGM 

** Voir mon message 62 : Pauses structurantes, pauses évocatives, rythmes d'apprentissage.

*** PEGASE est un "modèle pédagogique" qui décrit l'intégration de la GM dans la réalité des exigences du système scolaire actuel . Après l'écriture d'Accompagner… qui le décrit en détail, je l'ai exposé lors d'une conférence au CRDP de Rouen dans le cadre d'une Journée Interacadémique consacrée à l'Accompagnement personnalisé des élèves, lycéens en l'occurence, mais ce modèle est transversal - il vaut pour toutes les disciplines scolaires - aussi bien que vertical - il vaut pour tous les âges.

 

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