dimanche 18 décembre 2022

176. "Elle a le sens du jeu". D'ou vient donc ce sens chez les enfants ?


 Eh ! bien ! Voilà ! La grande course à la Coupe du monde 2022 est terminée, nous donnant à vivre en finale un match superbe où deux équipes à égalité de talent et de force morale n'ont été départagées qu'à l'ultime seconde par une "saute de chance" comme on le dirait d'un vent capricieux. Les sports en France ne se portent pas si mal à voir ce type de résultats. Et l'histoire d'un des héros du jour, Kylian Mbappé, est assez exemplaire d'un parcours dont les racines se trouvent à la fois dans une éducation familiale "intelligente" (il parle plusieurs langues et a obtenu le bac) et l'action positive d'un petit club local dirigé par son propre père, lui-même ancien professionnel de ce sport. Mon post d'aujourd'hui est justement consacré au "sens du jeu" dont ce footballeur d'exception a fait preuve pendant les matches que j'ai eu l'occasion de regarder. Il concerne pourtant ma petite-fille elle aussi passionnée de sport du haut de ses 10 ans ! Ce matin au téléphone, elle me disait : « Kylian joue bien, il marque des buts et il fait des passes décisives". Ma petite-fille a-t-elle, comme Kylian, le sens du jeu ? Et d'où cela lui viendrait-il ?

« Elle a le sens du jeu… »

Un jour que je prenais des nouvelles de ma petite fille, O., 10 ans, sa mère me dit qu’elle s’éclatait dans le sport, au centre hippique avec ses poneys comme sur le terrain de handball où son équipe était victorieuse de quasiment tous les matches qu’elle effectuait. Elle ajouta qu’elle était une des meilleures joueuses de cette équipe, précisant même : "Elle a le sens du jeu" comme le lui avait dit son entraîneurRien ne pouvait me faire plus plaisir que d’entendre cette appréciation. Elle traduit ce qui est à mes yeux le plus important dans l’éducation d’un enfant : qu’il ait acquis toutes les clés pour décrypter le sens des situations qu’il vit et vivra toute sa vie, dans tous les domaines, de façon à s’y adapter le mieux possible tout en travaillant à leur amélioration.

Je n’ai jamais vu O. jouer au handball (les entraînements ont lieu le mercredi et nous la voyons plutôt en week-end. Mais j’avais déjà remarqué combien elle était bien "dedans" ce sens lors de son premier concours hippique officiel (10 ans… ! Tout va tellement vite pour cette génération…Z… comme Zorro ?).

J’étais un peu inquiet en arrivant sur les lieux de cette "première" – l’équitation est un sport par essence dangereux et je tenais à ce qu'elle porte un gilet spécial pour protéger son dos lors des chutes toujours possibles. Mais assez vite mon inquiétude baissa lorsque je la vis se préparer au paddock : les gestes étaient précis, coordonnés, aucune excitation n’apparaissait dans son comportement, aucun signe d’inquiétude sur son visage concentré. Lors de la reconnaissance à pied du parcours d’obstacles, je la vis écouter sérieusement les explications de son instructrice, puis parcourir, toujours à pied et très consciencieusement, le parcours qu’elle aurait à effectuer un peu plus tard à cheval, sans en omettre la moindre partie, le moindre virage, sans "couper le fromage" comme le faisaient  plusieurs de ses camarades. Quand vint le moment du parcours officiel, je la vis avec un certain étonnement se comporter comme une vraie professionnelle, attendant patiemment le signal sonore indiquant qu’elle pouvait commencer – signal qui se fit attendre à cause d’un problème avec le concurrent précédent. Elle respecta la volte avant le départ et mit calmement son cheval au galop sur le bon pied… toujours sans aucun énervement apparent. Même si les obstacles n’étaient pas bien hauts, le parcours était assez complexe pour ce niveau d’âge, avec de nombreux virages souvent serrés. Tout se déroula impeccablement. Toujours aussi surpris, je vis O. guider sa jument calmement mais sans hésitation, l’amenant bien droit sur les barres ; au moment du saut son regard quittait l’obstacle actuel pour déjà viser le suivant, signe de grande confiance intérieure... Cela aurait pu n’être que le fruit d’un heureux hasard, d’un alignement favorable des planètes équestres… Je me disais en moi-même que ma petite-fille n’était sans doute pas aussi extraordinaire, que mon amour de grand-père m’aveuglait, faussant mon regard sur ce qui n’était après tout que des qualités bien ordinaires… Pourtant, n’ayant commis aucune faute dans ce premier parcours, O. fut invitée à en effectuer un second, identique mais avec des obstacles légèrement plus hauts. Ce fut un parcours aussi parfait  en tous points que le premier, effectué toujours aussi calmement, aussi efficacement, manifestation d’une parfaite entente entre la cavalière et sa ponette. Une vraie pro ! Dans cette occasion, elle fit la parfaite démonstration qu’elle avait acquis "le sens du jeu" dans le sport équestre tout autant qu’au handball.

Et à l’école ? Là aussi, tout se passe fort bien, avec les erreurs bien compréhensibles et tout à fait nécessaires à ses apprentissages. On peut dire qu’elle fait partie des "bons élèves" comme on les aime en salle des professeurs. Qu’est-ce qu’un bon élève ? C’est un élève qui sait quoi faire, pourquoi et pour- quoi le faire, comment le faire - en général et lui/ elle en particulier, quand et où le faire, en autonomie ou avec des partenaires. Il/ elle est "juste" en toute occasion. Il/ elle a "le sens du jeu scolaire". Manifestement, ce sens-là aussi ma petite fille le possède.

Serait-elle donc un cas spécial qui relèverait de la génétique ? Ou bien le "sens du jeu", en sport ou à l’école, lui serait-il venu de façon magique, comme un "don" offert par de bonnes fées réunies autour de son berceau ? Ce serait dramatique et profondément injuste pour les enfants qui n’auraient pas eu cette chance ! Alors… d’où ce sens lui vient-il donc ?

Pour le savoir, on pourrait relire mon message numéro 172.  "Savoir par cœur" un texte pour le théâtre ou une poésie pour la classe… au CM1. Apprentissage avec la Gestion mentale.  J’y décris comment, un an plus tôt, j’avais mené avec elle une séance d’apprentissage d’un texte pour son activité de théâtre, après, l’année précédente, celui d’une poésie à déclamer en classe. Il est peut-être hâtif de conclure à un rapport de causalité directe, mais quand même…  Après ses deux parcours de saut d’obstacle, pendant le pique-nique qui a suivi, j’ai demandé à O. comment elle avait fait pour installer le parcours dans sa tête au moment de la reconnaissance à pied, et comment elle l’avait réalisé plus tard à cheval. Sa réponse nous éclaire : « Je l’avais mis dans ma tête quand je faisais la reconnaissance, après je le voyais défiler dans ma tête quand je sautais en me disant ce qu’il fallait que je fasse* ». Comme pour la poésie et le texte de son atelier théâtre. 

Il est probable que l’acquisition de ce "sens du jeu" qu’elle manifeste aussi bien en sport qu’à l’école doive beaucoup à sa personnalité déjà bien formée et à son éducation familiale basée sur l’expérimentation autonome, le dialogue et la réflexion partagée avec ses parents **. Elle a aussi trois demi-sœurs, beaucoup plus âgées mais très proches, ayant reçu la même éducation, et cela lui fournit des exemples et un étayage très favorables. Toutefois, l’explicitation des habitudes mentales mises implicitement en place dans la famille et leur adaptation aux tâches scolaires a pu également jouer un rôle. On dit parfois que la gestion mentale pourrait se résumer à cette boutade : "Ce qui va sans dire va encore mieux en le disant". Cela est vrai pour éveiller à elle-même une conscience encore ignorante de ses potentialités, à l’aide des descriptions explicites des "gestes mentaux de la réussite". Mais aussi pour accompagner le transfert d’habitudes mentales acquises en milieu concret et familier (famille, activité manuelle, sport...) à des situations nouvelles aussi abstraites et symboliques que celles de l’école ; transfert qui, on le sait, ne va pas toujours de soi, surtout lorsque l’école se dispense d’en fournir les clés aux élèves qui ne les ont pas acquises ailleurs et qui souffrent tant de cette lourde inégalité.

Nous n’avons qu’un seul et même cerveau pour mener nos activités manuelles, sportives ou scolaires ; et nous n’avons qu’une conscience pour diriger notre cerveau. Cette conscience, exercée implicitement ou, mieux encore, explicitement, dans des situations différentes, dans des domaines différents, à différents niveaux d’abstraction, là est sans doute la véritable source du "sens du jeu" manifesté par ma petite fille dans toutes ses actions.

Pour conclure ce message, on ne me reprochera pas de faire un rapprochement entre les prouesses équestres d’O. et sa connaissance, implicite ou explicite, de la manière de gérer "Pégase"***, la cavale mythique qui d’un coup de son merveilleux sabot libère la source du sens et de la connaissance. Sur les terrains de sport comme à l’école.

* Cela m’a rappelé une anecdote tirée de ma propre expérience. J’étais moi-même cavalier autrefois et j’avais une certaine pratique du saut d’obstacles, surtout du Concours Complet, une épreuve qui réunit un Cross (épreuve de vitesse avec obstacles fixes), un CSO (parcours d’obstacles à barres mobiles) et une épreuve de dressage (démonstration du calme et de l’obéissance du cheval, de son degré de dressage). Lorsque, en 1990, j’ai débuté la formation de Profil pédagogique à l’Institut Supérieur de Pédagogie (ISP), Antoine de la Garanderie ayant demandé un volontaire pour faire une démonstration de cet exercice si particulier, je m’étais proposé. Il m’avait demandé de détailler une activité qui m’était familière. J’avais alors raconté comment je m’y prenais pour reconnaître les parcours de Cross avant une épreuve : l’observation des obstacles, de leur construction, de leurs abords, leurs difficultés particulières, la consistance du terrain, son inclinaison, etc. Je précisais la manière dont j’enregistrais tout cela en me parlant intérieurement et comment j’imaginais que j’allais conduire mon cheval en me faisant le film de cette approche accompagné de mes commentaires ; je voyais dans ma tête se dérouler le parcours, d’abord comme un spectateur qui me verrait passer, puis moi-même en selle ne voyant plus que l’avant de mon cheval et le chemin/paysage qui défilait devant nous, les obstacles qui se rapprochaient, tout en me formulant les consignes adéquates : ralentir, conduire, rééquilibrer, envoyer de l’énergie...

**  Dans les années 1980 des recherches ont été effectuées pour vérifier s’il y avait un rapport entre l'éducation familiale et la réussite scolaire. Parmi d’autres facteurs pouvant être déterminants - notamment socio-économiques -  J. Lieutrey, un chercheur qui fait encore référence aujourd’hui, distinguait alors trois modèles d’éducation parentale pouvant favoriser ou contrarier cette réussite   :

  • un modèle autoritaire, dans lequel "un contrôle trop rigide vient inhiber chez l’enfant l’envie d’explorer le monde, pousse à la conformité plus qu’à la curiosité, entraînant passivité, anxiété face à l’échec, voire des comportements obsessionnels" 
  • à l’exact opposé, un modèle laxiste, dans lequel "aucune limite n’est proposée à l’exploration du monde par l’enfant, ne lui permettant pas de structurer le réel, ni d’avoir assez de repères pour s’y mouvoir et se construire" 
  • entre les 2, un modèle dit "démocratique" qui "conjugue la confiance en l’enfant autorisé à explorer les lieux, les objets, les idées, les contacts avec d’autres, enfants ou adultes, et une initiation aux règles et aux normes sociales en les expliquant plus qu’on les imposant, ce qui facilite leur appropriation raisonnée et durable. Cette éducation concoure à développer l’autonomie et la responsabilité". 
(Source : Le rapport à l’Ecole des élèves de milieux populaires, J. Bernardin. De Boeck. 2013). C’est ce dernier modèle qu'ont adopté les parents de ma petite fille : il a très probablement sa part dans l’accès au sens dont elle témoigne.

***P.E.G.A.S. Projet Global d’Apprentissage Scolaire… ou Sportif…

 


mercredi 1 juin 2022

175 - Histoire d'un livre. Présentation de la genèse du livre « Accompagner de travail des adolescents avec la pédagogie des gestes mentaux »

 Histoire d'un livre.

Le 19 mai dernier, j'étais invité par l'Association Initiative et Formation Rhône-Alpes (IFRA) pour parler de la genèse d'Accompagner… qui vient d'être réédité pour la cinquième fois. Ce livre  est apprécié des accompagnateurs formés à la gestion mentale comme de beaucoup d'autres qui en sont éloignés et de beaucoup d'enseignants du public ou du privé qui se le sont appropriés et dont il a éclairé et modifié les pratiques quotidiennes.

A cette occasion, j'ai été très heureux de faire un petit retour sur plus de 50 ans de ma vie. En retraçant le cheminement de ma réflexion à partir des années 1960, je me suis rendu compte de façon très claire que mon fil conducteur avait toujours été le souci de rendre accessible au plus grand nombre de jeunes les secrets de la réussite scolaire... que l'école se garde bien de leur transmettre de manière à pouvoir effectuer sa mission de sélection des meilleurs (inavouée, si contradictoire...plus à l'ordre du jour désormais - du bacc tout au moins - mais toujours à l'œuvre dans les inconscients de beaucoup de ses acteurs) ... cette mission dont on connaît les ravages sur la personnalité des jeunes personnalités qui en sont les victimes ; ou tout simplement parce qu'elle ne s'est jamais posé la question... les enseignants, anciens bons élèves, ne comprenant pas que l'on puisse ignorer les "règles du jeu scolaire" qu'ils ont pratiqué avec succès mais sans jamais en prendre  clairement conscience.

Vous trouverez ici la vidéo de la présentation que j'ai faite du parcours qui a mené à l'écriture du livre, de mes réflexions, de mes lectures des travaux d'Antoine de la Garanderie ou d'autres noms de la littérature pédagogique, ainsi que de mes expérimentations auprès des centaines de jeunes dont j'avais la charge.

Présentation (Video) de l'histoire du livre. .

La soirée était équilibrée, avec à peu près une heure pour chaque partie. Dans un deuxième temps, le public - une cinquantaine de personnes, accompagnatrices, praticien(ne)s, orthopédagogues, formatrices, étudiants... - a posé des questions, toujours pertinentes et à base de situations vécues, auxquelles je me suis efforcé de répondre aussi concrètement que possible malgré mon éloignement actuel du terrain... Certaines m'ont renvoyé à des événements passés et heureux... 

Au final, très bonne et vivifiante soirée  ! J'avais 40 ans de moins...

 

dimanche 8 mai 2022

174. Se remémorer, réactiver... c'est bien ... MAIS CE N'EST PAS MÉMORISER.

Certains auteurs de blogs... ou de livres... peu ou mal renseignés, réduisent souvent l'acte de mémorisation à la répétition...  Au mieux, aux réactivations... Certes, elles sont importantes. Mais ces auteurs oublient l'essentiel.

À plusieurs reprises, j'ai écrit dans ce blog que les réactivations systématiques recommandées pour entretenir la mémoire sur le long terme, c'est bien... mais ce n'est pas mémoriser. Rappeler un souvenir du passé n'est pas mémoriser, c'est se remémorer. Se remémorer à intervalles réguliers un souvenir, c'est le réactiver : ce n'est pas le mémoriser. Si le souvenir n'a pas été constitué dès le départ, tout le reste ne sert à rien, tout le reste n'est plus qu'un vain rabâchage

La mémorisation est le premier geste mental, le premier projet de sens très clairement défini par Antoine de la Garanderie : son essence est de placer par anticipation un évoqué (le produit d'un acte d'évocation) dans un imaginaire d'avenir d'une situation de rappel. C'est tout. Mais c'est énorme ! C'est le mouvement d'une conscience connaissante qui donne à une action présente, ici et maintenant, une existence dans un ailleurs et un plus tard. C'est transcender le temps et l'espace. C'est cette mission, et elle seule, donnée à un souvenir d'avoir à revenir dans un futur clairement défini qui justement lui permet d'être rappelé, d'être remémoré, d'être réactivé. Chaque moment à sa place !

Voici à ce sujet un texte que j'ai écrit pour mes amis choristes qui ont du mal à mémoriser d'une répétition à l'autre jusqu'au concert terminal. La gestion mentale s'adapte à tous les moments et tous les lieux de notre vie !

Article : Mémoriseren chant choral.

lundi 7 février 2022

173. Cinquième édition pour Accompagner le travail des adolescents !

Après ces mois, ces années mêmes, où le moral de chacun n’était pas au plus haut du fait de cette interminable pandémie, est-il permis de se réjouir de ce qu’un livre connaisse un - très, très relatif - succès sans qu'il soit pour autant le déballage indécent de quelque vedette en mal de publicité… ou les éructations haineuses d'un politicard aigri et revanchard… ou même le palpitant récit d’un romancier en vogue ? Même si ce livre n’est que la relation d’une simple expérience professionnelle d’éducateur scolaire et la mise à la portée du plus grand nombre des travaux d’un –  trop méconnu - philosophe humaniste, Antoine de LA GARANDERIE, dont la perspicacité tenace et la grande bienveillance ont si fortement contribué à illuminer le regard de tant d’enfants et d’adolescents qui se croyaient perdus ?

Eh bien ! Je me le permets ! Je viens de recevoir mes "exemplaires d’auteur" de la cinquième édition de mon livre Accompagner le travail des adolescents avec la pédagogie des gestes mentaux. Il est vrai qu’avec un tel titre, mon livre ne peut faire la devanture des libraires à la mode… ni le sujet d'émissions télévisées grand public. La Grande librairie ne m’a pas encore invité…

Ce n’est qu’un livre bien modeste qui ne me rendra guère bien riche malgré ses tirages successifs. Et pourtant, je me réjouis ! Je me réjouis parce que, chaque fois qu’il s’en vend un exemplaire, ce sont peut-être des adolescents qui finiront de galérer sur leur travail scolaire et, cessant de se désespérer de leurs échecs répétés, retrouveront le sourire et verront la vie s’éclairer à nouveau devant eux ; ce sont peut-être des éducateurs, des orthopédagogues ou orthophonistes, des coaches scolaires comme on les appelle désormais, qui sauront un peu mieux les amener à retrouver les moyens de leur réussite et la confiance en leur potentiel ; ce sont peut-être des parents, des familles, qui regarderont leur fille, leurs fils avec un peu plus d’espérance, ce qui rendra les relations familiales plus détendues ; ce sont peut-être des professeurs qui découvriront des aspects jusque-là trop cachés d’un métier qu’ils maîtrisent mal faute d’une formation sérieuse qui les y prépare, et qui reprendront goût à leurs activités de "facilitateurs d’apprentissage" - ou "d'artisans du faire apprendre" pour paraphraser Heidegger - activités indissociables de leur fonction d’enseigneur. En procurant les moyens de retrouver le plaisir d'apprendre, il sera peut-être le révélateur du bonheur oublié de connaître. Et cela, oui, me remplit de fierté et de joie à défaut d'euros... Il y a longtemps que j'ai fait mon choix.

En l’écrivant, il y a près de 15 ans… déjà…, j’avais plus ou moins confusément l’intuition que, s’il ne concourrait pas pour quelque prix littéraire dont parleraient la presse people, du moins ferait-il son petit bonhomme de chemin dans le monde de la pédagogie et de la formation - si peu propice aux éclats publicitaires -, et même – je l’espérais - dans le "milieu enseignant" si difficile à pénétrer et à convaincre. Il y a partout tellement de personnes de bonne volonté qu’il suffit de peu de choses pour mettre - ou remettre - en route dans le projet de contribuer à la plus grande réussite intellectuelle et humaine de notre jeunesse. Elle en a tant besoin, cette jeunesse, aujourd’hui encore plus que jamais.

Je me réjouis donc, sans réserve et sans scrupules, de cette cinquième édition et j’adresse un grand merci à mon éditeur, André Soutrenon, qui avec son équipe tient bon la barre des éditions La Chronique Sociale, en cette période quelque peu maussade - passagère, souhaitons le - pour la littérature pédagogique.

Et puisque nous sommes en pleine saison sportive hivernale autant que lointaine, j'ajoute un encadré de la page 120, où après avoir comparé une activité d'EPS assez classique avec l'ensemble des opérations mentales à effectuer pour atteindre la réussite scolaire, je fais ce rappel important ; 

(*) Attention : Il faut insister sur ce TOUS. Il est assez courant de constater que l'on aide assez facilement les élèves en difficulté dans les activités "d'entrée" des connaissances : l'attention, la mémorisation, un peu la compréhension… mais c'est plus difficile. Il est plus rare que l'on apporte de l'aide aux activités de "sortie": la réflexion et la communication sur lesquelles  portent pourtant la plupart des évaluations. Pour une efficacité complète il faut aller "jusqu'au bout" de l'accompagnement, couvrir "tout le terrain" de l'apprentissage comme dans l'enchaînement gymnique.

 

 

 

 

 

Cela fera écho également à ces phrases de Philippe Meirieu dans La Riposte :

« Si je parviens à inventorier suffisamment les entrées possibles dans un ensemble de connaissances, ne serai-je pas en mesure de couvrir plus largement le champ des motivations des apprenants et d'articuler plus efficacement des savoirs nouveaux à leurs savoirs anciens ? Si je suis capable de repérer les opérations mentales qu'il convient d'effectuer pour accéder à telle ou telle notion, ne pourrai-je pas, plus facilement, construire un dispositif qui permette d'en reconstituer la genèse ? Si je peux imaginer différents itinéraires, différents supports, différentes situations sociales, différentes manières de s'y prendre pour parvenir aux mêmes objectifs, ne serai-je pas mieux placé pour proposer à chacun l'itinéraire le plus adapté ? Car ce n'est pas la connaissance qui nuit au pédagogue, mais le fait de la considérer comme un « simple » résultat et d’oublier son histoire. »

J'ajoute, et ce n'est pas rien, que cette nouvelle édition est particulièrement soignée, avec un police plus grande, des encadrés encore mieux mis en évidence... Un bel objet-livre ! 

Alors, bonne (re?)lecture !

 





 


189 - "Si l’on veut permettre à un être humain d’être reconnu comme une personne, il faut lui donner les moyens pour qu’il y parvienne"

Je publie aujourd'hui un autre texte, déjà ancien, extrait de mon fond documentaire personnel. Un de ces textes qui ont nourri ma "...