samedi 29 décembre 2018

139. Découverte mathémathique, réflexion, procrastination et organisation du travail.


Je trouve ce passage dans Le code de la conscience de Stanislas Dehaene à propos de la découverte mathématique et du rapport conscient/inconscient dans le cerveau humain.
On peut en tirer quelques conseils méthodologiques pour nos « apprentis sages » lycéens ou étudiants, en toutes disciplines. Et aussi réhabiliter (en partie) la « procrastination »… qui n’est peut-être pas toujours le défaut aussi vilain qu’on le dit (à une certaine condition quand même)…

« Jacques Hadamard (mathématicien émérite, 1945) proposait de décomposer le processus de la découverte mathématique en quatre étapes successives : la préparation, l’incubation, l’illumination et la vérification. La préparation recouvre toute la phase d’exploration délibérée d’un problème. Cette attaque frontale, hélas, demeure souvent vaine – ce qui ne signifie pas qu’elle soit inutile, car c’est elle qui déclenche la réflexion inconsciente. La phase d 'incubation peut alors démarrer – une période de maturation invisible durant laquelle l’esprit reste vaguement préoccupé par le problème, sans toutefois montrer le moindre signe d’une ardente cogitation. L’incubation demeure invisible mais son impact est immense. Soudain, après une nuit de sommeil, une bonne marche ou une douche, survient l’illumination : la solution apparaît dans toute sa splendeur. Elle est souvent juste, mais il reste encore à la soumettre au crible de la vérification consciente, qui en dissèque chaque détail. » (CC p 117).

Je note que pour une fois on ne nous parle pas du seul cerveau ou des neurones, mais bien de "l'esprit vaguement préoccupé". Dont acte ! Nous sommes donc validés pour en parler en utilisant le vocabulaire de la Gestion mentale. En résumant, cela pourrait alors donner :

          La phase de préparation/exploration délibérée est consciente et volontaire, organisée, à base d’évocations à visée d'analyse précises et détaillées : ce sont les premières étapes de lecture et d'analyse  de l'énoncé (ou de la situation) du geste mental de réflexion, suivies de la formulation d'une problématique claire et bien cernée ;
La phase d’incubation est inconsciente, l’esprit est "vaguement préoccupé" par le problème dégagé par la phase de préparation : retour d'acquis anciens et d'automatismes, sélection d'évoqués se rapportant de près ou de loin à la problématique, invention plus ou moins consciente de liens inédits et originaux, dans une visée de sens de découverte ;
L’illumination est une phase soudaine de retour non volontaire à la conscience : le "tri" des acquis et des liens effectués par la claire conscience de la problématique, aboutissant à l'intuition d'une solution;
La vérification est consciente et volontaire, organisée, elle aussi à base d’évocations analytiques précises et détaillées, d'activité de comparaison par différences et similitudes : c'est l'étape de la mise en forme rationnelle et communicable d'une solution au problème.

 Et Dehaene de conclure : "Plusieurs expériences récentes ont validé cette théorie ancienne. D’ailleurs "la sagesse populaire n’a pas complètement tort lorsqu’elle affirme que laisser reposer un problème conduit souvent à de meilleurs résultats que de suer sang et eau pour le résoudre immédiatement." (p. 119)

Moralité : Ces études  permettent de tirer quelques enseignements de méthode pour le travail scolaire.

S'il ne s'agit pas à proprement parler de "découverte mathématique" (tous les élèves ou étudiants ne sont pas Poincarré, dont l'exemple est cité par Dehaene pour introduire la théorie d'Hadamard), on peut élargir la théorie à tout problème de compréhension approfondie d'un cours ou d'un texte un peu ardu, ou d'une situation nouvelle et complexe. Ou à un problème donné à résoudre en travail personnel sur une certaine durée. L'organisation du travail de l'élève doit tenir compte des quatre étapes et de leur "moment" privilégié.

Par ailleurs, ces expériences semblent éclairer d’un jour inhabituel la procrastination (remettre un travail au lendemain) qui ne serait plus dans ce cas un si "vilain défaut". On pourrait même imaginer une organisation du travail dans laquelle elle pourrait trouver sa place, mais à une condition importante : procéder à l’analyse et à la formulation d'une problématique (exploration) le plus tôt possible après en avoir pris conscience de l'énoncé ou de la situation (donc le jour même). Puis on pourrait "donner du temps au temps" (notamment par une bonne nuit de sommeil... qui toujours "porte conseil"...) pour mener les opérations inconscientes (incubation) qui mènent à l’illumination du lendemain matin, pour ensuite se consacrer, de nouveau consciemment, à la vérification des résultats obtenus ... ou la relecture de l'énoncé, du cours difficile ou de la situation de départ.  Cette "bonne" procrastination permettrait ainsi d’utiliser au mieux l’imbrication conscient/inconscient, toujours à l’oeuvre dans toutes nos actions mentales, même les plus élaborées.

On objectera que les épreuves scolaires en temps limité ne permettent pas un tel déploiement temporel. Ce serait oublier que cela se prépare ! Les automatismes forgés en amont, par des mois ou des années d’entraînement, servent-ils donc à autre chose qu’à accélérer le temps d’incubation, c’est-à-dire la phase des calculs automatisés/inconscients (mémoire procédurale) de fonctionner correctement et de livrer au cortex conscient des résultats fiables le plus rapidement possible (voir message  121)? C’est la seule étape qui peut être ainsi raccourcie (au moment de l’examen ou du concours), laissant plus de place aux phases conscientes et plus lentes de l’exploration et de la vérification, apanage des "fonctions exécutives" des couches supérieures du cerveau, celles du jugement, du libre-arbitre et de la décision.



lundi 24 décembre 2018

137.Tout savoir sur une formation en gestion mentale en Lycée


La gestion mentale connaît actuellement un regain de popularité et de visibilité par sa convergence de plus en plus évidente avec les apports les plus récents des recherches en neurosciences cognitives. Certains livres ou articles de chercheurs sont écrits avec des termes qui frôlent le plagiat tellement ils sont proches d’une partie de la terminologie patiemment élaborée par Antoine de la Garanderie... sans que jamais il ne soit cité.... Ainsi,  Jean-Philippe Lachaux utilise-t-il, dans "Cerveau et psycho" de décembre 2018 (voir message 135), un vocabulaire très proche du nôtre en soulignant " le rôle fondamental de l’intention de l’enfant (que l'on doit inciter) à verbaliser ce qu’il s’apprête à faire avant d’aborder l’activité". Il précise même l'importance de l’interaction pédagogique du professeur ou de l'accompagnateur avec l’élève, destinée à lui faire valoir qu’il a à sa disposition tout un arsenal "dans sa tête" qui lui permet de :
  • utiliser des "gestes mentaux"(sic) qui lui réussissent dans la vraie vie, et (...) de les reconnaître dans d’autres situations, pour les utiliser notamment dans la résolution d'un problème de géométrie  (mais sans préciser la structure de ces "gestes"),
  • prendre l’habitude de produire des images mentales internes (mais sans préciser la nature de ces "images" qui peuvent être aussi bien visuelles, auditives ou verbales, tactiles, gustatives, etc...), 
  • convertir des mots lus en produisant des images mentales internes
Un vrai dialogue pédagogique  ! 

« Toutefois, ce type d’interaction avec l’enfant n’est possible qu’avec des enseignants et des formateurs ayant eux-mêmes acquis une culture métacognitive, et l’un des grands apports des neurosciences cognitives dans le domaine de l’éducation sera sans doute de leur apporter cette culture. »
Tout ceci est bien joliment dit, et si modernement !,  mais les neurosciences sont encore loin d’avoir élaboré les moyens d’apporter cette culture métacognitive aux enseignants, ce que fait la gestion mentale depuis plus de 40 ans… dans l’ombre et désormais loin des médias simplificateurs.

Pour étayer cette idée, je mets en ligne aujourd’hui  (et avec la permission de la formatrice) une émission de RCF Côte d’Azur dans laquelle sont détaillées très précisément toutes les facettes d’une formation en Gestion Mentale donnée par Joëlle Murgia en 2017 dans un Lycée professionnel public de cette douce région. Pour la commodité de l’écoute, j’ai découpé l’émission en plusieurs passages, selon les thèmes abordés et en excluant musiques et autres intermèdes. On peut les choisir en fonction de son intérêt premier, mais l’ensemble est à écouter car chaque morceau complète les précédents.


On peut entendre l'émission intégrale sur le site de RCF (il y a deux séquences).

jeudi 20 décembre 2018

136 -La gestion mentale, une métapédagogie : un exemple !

Dans son dernier livre, dont je fais état dans le message 134, Yves Lecocq situe la gestion mentale non comme une méthode, non comme une pédagogie en soi, mais comme une "métapédagogie" (au-delà, au-dessus, en amont de la pédagogie), c'est-à-dire un éclairage, un "supplément d'âme", une visée de sens qui peut finaliser en les dynamisant toutes les pratiques pédagogiques déjà élaborées par l'expérience et l'observation de "l'artisan du faire apprendre" qu'est tout enseignant.

Dans les années 1990, j'ai animé beaucoup de formations dans les collèges ou des lycées, notamment au sein de la MAFPEN (l'organisme de formation continue des enseignants de l'Éducation nationale de l'époque), dans laquelle la gestion mentale avait (encore) droit de cité.

L'une des stagiaires d'un collège public de Niort, à l'issue de quatre journées de stage dans son établissement, avait pris la peine de mettre en forme la façon dont elle avait intégré la gestion mentale dans ses pratiques déjà instituées en les prolongeant, en leur donnant encore plus de sens et d'efficacité, illustrant bien par-là l'apport "métapédagogique" de la gestion mentale.

À la lecture du livre d'Yves, j'ai repensé à ce témoignage. Il n'a rien perdu de son intérêt et il est toujours d'une grande actualité. Je le remets donc "au dessus de la pile" : il pourra peut-être éclairer certains enseignants ou formateurs sur la manière de recevoir ou de transmettre cette métapédagogie qui n'est décidément pas la "vieille dame moribonde" (voir N. Bouin, à la fin du message 134) que certains voudraient qu'elle soit. Bien au contraire !

Consulter l'article "Passage à la pratique après une formation". (C'est aussi le message 33 de ce blog)


mardi 18 décembre 2018

135 - Neurosciences et gestion mentale : la métacognition au secours de l'école !


J’étais en train d’écrire mon message 134 à propos du beau et important livre d’Yves Lecocq, et je le terminais en citant les mots de Nicole Bouin dans les Cahiers pédagogiques sur "la remarquable modernité" de la gestion mentale, lorsque j’ai reçu une notification pour l’article de Jean-Philippe Lachaux dans "Cerveau & Psycho" de ce mois-ci : Éduquer la métacognition, la clé du succès pour les enfants ! Avec un sous-titre explicite : "Savoir se fixer un but, planifier les étapes pour y arriver, prendre conscience de ses propres pensées et émotions, tout cela s’entraîne par des méthodes aujourd’hui validées". Et un encart alléchant : "Pour transférer une capacité cognitive depuis un exercice spécifique vers un champ scolaire, il faut élaborer un vocabulaire dédié".

On peut aussi écouter des extraits (regroupés par mes soins) de l'émission de France-Inter : La tête au carré" du 5 décembre dernier  (2018) sur le thème de la métacognition. on y parle de l'entretien d'explicitation. Certains passages plairont (?) aux praticiens GM ! Du vrai plagiat !

Imaginez mon impatience de découvrir le contenu de cet article tellement "novateur" : prise de conscience, transfert, vocabulaire dédié... On va  parler de Gestion mentale, c'est sûr !! Voyons cela de plus près.

Dès le départ, l’auteur fait état des "fonctions exécutives", ces "processus permettant d’éviter que notre comportement soit une simple succession de réactions réflexes à notre environnement", en soulignant qu’"elles impliquent majoritairement le cortex préfrontal, manifestement plus développé chez l’homme que chez le cochon d’Inde". Nous voici rassurés ! 

L’auteur poursuit : "Sachant cela, on ne sera pas étonné d’apprendre que l’efficacité des fonctions exécutives d’un enfant prédit mieux encore que son QI ou le statut socio-économique de sa famille, quelles seront sa réussite professionnelle, sa santé et sa qualité de vie une fois adulte. Elles constituent donc naturellement une piste privilégiée pour quiconque veut développer son potentiel d’être humain, et tout système éducatif devrait à l’évidence compter le développement des fonctions exécutives de l’enfant parmi ses objectifs principaux ; ce qui amène immédiatement la question suivante : comment améliorer les fonctions exécutives des élèves ?" Bonne question, en effet ! Je sens qu’on va atteindre l’essentiel !

L’auteur fait alors référence à des études d’une professeure de neurosciences cognitives de Vancouver qui a consacré "l’essentiel de sa carrière à explorer cette question". Bigre ! Au Canada ? Alors là, c’est sûr on va parler de la gestion mentale… Mon impatience devient fébrile.

Notre professeure "dresse une liste assez exhaustive des différentes voies déjà explorées pour améliorer les fonctions exécutives des enfants et testées scientifiquement". Aïe ! "testés scientifiquement"...On sent venir la tuile…. Voyons quelles sont ces différentes voies si bien explorées : "… une très grande variété d’interventions allant de la pratique des arts martiaux à la course à pied, en passant par le théâtre, la méditation ou les jeux vidéo". Alors, bien sûr le théâtre développe la mémorisation, les arts martiaux apprennent le contrôle et l’inhibition… Mais heureusement la recherche ne se satisfait pas de ces alliés un peu trop éloignés du vécu scolaire (et du reste pas si nouveaux...) : "En réalité, les choses ne sont peut-être pas aussi simples, sans quoi l’enseignement traditionnel devrait suffire largement, puisque les activités qu’il propose sollicitent pour la plupart (!) ces fonctions, et à raison de plusieurs heures par jour". Il manque donc "un ou plusieurs ingrédients essentiels" que les chercheurs ont tentés d’identifier. Ça y est ! on y vient !

On passe sur les propositions d’intégrer ces "nouveautés" avec grande prudence dans le milieu scolaire. Notamment, "il faut accepter que l’intervention prenne du temps au quotidien, et qu’elle imprègne tout l’enseignement. Les compétences exécutives ne s’apprennent pas d’un seul coup… il s’agit d’un projet global, au long cours." Projet global ? En rapport avec l’apprentissage ? Tiens tiens, Pegase s'ébroue et dresse une oreille...

Puis on constate l’inefficacité de "plusieurs exemples de programmes qui n’ont pas donné de résultats probants", notamment par leurs difficultés à transférer les résultats à l’apprentissage scolaire (ce qu’on savait depuis longtemps...). Un exemple cependant paraît efficace, qui s’inspire des travaux de Vygotsky, et qui "insiste particulièrement sur le rôle fondamental de l’intention de l’enfant, l’incite à verbaliser ce qu’il s’apprête à faire avant d’aborder l’activité". L'intention avant l'action, donc le projet ?... On brûle !

"Dans les quelques cas où des transferts ont été constatés entre un entraînement isolé et d’autres situations par exemple scolaires, il semble que l’enfant ait été aidé d’un adulte pour analyser sa stratégie gagnante et y identifier les composantes cognitives communes avec le travail scolaire. C’est ce qu’on appelle un accompagnement métacognitif : faire découvrir et comprendre à l’enfant (attention tenez-vous bien !) les « gestes mentaux » (sic !) qu’il doit utiliser pour résoudre un problème, dans un jeu vidéo ou dans la vraie vie, et lui permettre de les reconnaître dans d’autres situations. Par exemple, l’enfant qui aura pris l’habitude de produire des images mentales internes (re-sic !) pour mieux évoluer dans un jeu vidéo, s’il se rend compte de la stratégie adoptée, pourra l’utiliser dans la résolution d’un problème de géométrie". Et voilà ! De "gestion mentale" il n’est pas question, bien sûr, et de La Garanderie, encore moins ! Ça, c’est toujours interdit ! Mais parler de « gestes mentaux », d’ « images mentales internes », ça, c’est permis… Parce que "testé scientifiquement" ? Hé! Hé ! Toujours bon à  prendre !

Allez ! Enfonçons le clou. "Ce type d’accompagnement dit métacognitif implique une compréhension fine du « comment », qui étend aux gestes mentaux (ce n’est même plus entre guillemets…) une forme d’apprentissage déjà à l’œuvre pour apprendre des procédures corporelles : par exemple, un enfant qui apprend à nager le crawl combine les gestes qu’il connaît déjà dans d’autres activités. Sur le plan cognitif, le « geste » qui bloque peut être travaillé dans différents contextes, jusqu’à ce qu’il devienne naturel. » Allez, Monsieur Lachaux un petit effort encore, vous y êtes presque ! Vous allez fini par le dire "gestion mentale"...!

"Cette compréhension de son propre fonctionnement mental passe par la mise en place d’un vocabulaire commun entre l’enfant et l’enseignant pour désigner et reconnaître des processus mentaux bien précis, qui paraissent d’abord mystérieux parce qu’ils ne sont pas "visibles" de l’extérieur, mais qui n’en sont pas moins très concrets (du pur la Garanderie ! les "abstraits réels" de Burloud *... Wouah ! La belle nouveauté "scientifique" que voilà !  En plus, c'est sûr, pour bien "dialoguer" en matière de pédagogie, encore faut-il avoir un vocabulaire commun ! Grande nouveauté  là encore...). Ainsi, la conversion d’un mot ou d’une phrase que l’on entend (« le renard sortit de la forêt ») en une image mentale reprenant la situation décrite est une forme d’action très précise que l’enfant doit apprendre à réaliser et qui l’aidera à comprendre une histoire et la raconter ensuite. » Moi j'utilise  plutôt "le cheval galope dans la prairie"...; Oui ! C'est ça ! ça doit être ça la vraie différence entre les neurosciences et la gestion mentale : on n'est pas dans le même bestaire... Mais restons sérieux... l'évocation est donc bien une "action très précise" ? Et ça aide à comprendre ? Et à raconter ? A dialoguer ? Chouette alors !

On encourage ensuite l’enseignant à proposer un vocabulaire « commun et bien compris pour désigner cette « conversion » : comme le « cinéma intérieur »… Antoine, réjouis-toi, ils ont enfin (un peu) compris !

Une petite précaution pour terminer : « Toutefois, ce type d’interaction avec l’enfant n’est possible qu’avec des enseignants et des formateurs ayant eux-mêmes acquis une culture métacognitive, et l’un des grands apports des neurosciences cognitives dans le domaine de l’éducation sera sans doute de leur apporter cette culture. » Sans blague ! Mais mon pauvre Monsieur, c’est déjà fait, et depuis longtemps, et sans vous ! Mais c'est vrai, ce n'était pas (encore) "testé scientifiquement", alors...

Merci tout de même, Monsieur Lachaux ! Peut-être que les neurosciences arriveront un jour à nous apporter cette culture…que nous avons déjà sans que vous vous ne vous en avisiez. Mais avant de nous annoncer cette heureuse perspective, en bon scientifique que vous êtes et qui devrait donc cultiver un minimum de curiosité (à défaut d’honnêteté intellectuelle), peut-être auriez-vous pu vous renseigner sur les travaux d’Antoine de la Garanderie qu’on appelle la gestion mentale ? Ce serait tellement bien si nous pouvions, et là nous vous rejoignons, accélérer l'arrivée de cette "culture métacognitive" qui nous paraît à tous si indispensable pour sauver notre école du désastre qui se profile.... et que vous et les vôtres avez si longtemps dénigrée et condamnée... et donc retardée... au grand dam de tant d'enfants que vous prétendez désormais sauver. Il n'est jamais trop tard... mais quand même...

* Et puis "tester" Burloud... en 2018... un demi-siècle après l'écriture de Thématisme et schématisme - Le dynamisme des structures inconscientes dans la psychologie d'Albert Burloud… C'est Antoine qui doit être bien heureux de voir ça de là où il est !

134 - Un livre important d'Yves Lecocq qui redonne une vraie jeunesse à la Gestion mentale


J’ai déjà eu l’occasion (messages 130, 132) de citer le dernier et récent livre d’Yves Lecocq : (Re)penser l’acte d’apprendre, la gestion mentale : une réponse aux défis éducatifs (Chronique Sociale, Septembre 2018). Le président de l’Institut International de Gestion Mentale nous livre dans cet ouvrage une véritable « Défense et illustration de la gestion mentale » et cela dans l’environnement très actuel de ce début de XXIe siècle. Yves Lecocq analyse avec une précision quasi chirurgicale ces "défis" posés à l’éducation par les jeunes de la génération Z (qu'il décrit d'ailleurs fort bien, pages  114-117, prouvant ainsi que ses analyses sont très loin d'être "hors-sol"... comme le sont parfois celles de neuroscientifiques un peu trop sûrs de leurs "vérités"...soi-disant novatrices) . Ces jeunes qui depuis l’an 2000 sont nés le smartphone à la main (chacun le sien et Snapchat pour tous !), au-delà même du bain numérique de la génération précédente, génération Y déjà tellement peu motivée par des formes d’apprentissage trop traditionnelles. Ces décalages de plus en plus criants entre les jeunes et l’institution scolaire chargée de les ouvrir au monde et de les préparer à la vie en société, ont entraîné des querelles et des conflits, des postures et des rejets, voire des propositions tous azimuts d’enseignement alternatif ou de "méthodes miracles" ...et au final le décrochage massif d’une fraction importante de notre jeunesse qui fuit une école tellement éloignée désormais de ses préoccupations immédiates, et aux canons de laquelle ils sont tellement peu prédisposés par leur environnement socio-culturel.

Passant en revue tous ces défis, tous ces courants et postures (très gros, exhaustif et intéressant travail de recensement du panorama pédagogique actuel !) Yves Lecocq propose pour chacun d’eux le regard distancé et plein d’humanité de la gestion mentale d’Antoine de LA GARANDERIE : en quoi peut-elle répondre à ce défi spécifique ? Loin d’être une "méthode" (toutes passent un jour… même les "miraculeuses" ) ni même une pédagogie parmi d’autres (tout ne se vaut-il pas de nos jours ?), la gestion mentale, "pédagogie « en 1re personne » fondée sur l’introspection cognitive *" apparaît alors comme une "méta-pédagogie", c’est-à-dire un complément indispensable à toute pédagogie pour acquérir son sens et atteindre sa finalité : favoriser la rencontre d’un jeune être humain avec le monde des êtres et des choses qu’il est avide de connaître et dont il a vocation à décrypter le sens. Pour cela, "il insiste sur la nécessité d’articuler la transmission des incontournables, des passages obligés dans les processus d’apprentissage, et la construction par l’apprenant de ses processus spécifiques en fonction de sa personnalité cognitive"*. Sur cet enjeu devrait se fonder toute action éducative, et toutes les pédagogies du monde se rejoindre dans un même élan afin d’offrir plus d’être, plus de sens, plus d’humanité à une jeunesse qui en manque terriblement.

Il serait trop long de détailler par le menu la somme considérable d’informations et de réflexions que peut inspirer la lecture du livre d’Yves Lecocq. Tous les pédagogues désireux de mieux comprendre leurs élèves et de les amener à la réussite, tous les "coaches",  tous les praticiens de la gestion mentale,  déjà formés ou en formation, tous les accompagnateurs en individuel ou en groupe, sans parler bien sûr de leurs formateurs, trouveront dans cette lecture de quoi refonder, revivifier, approfondir et élargir leur adhésion à cette « gestion mentale qui nous apparaît ici d’une remarquable modernité quand certains la présentent comme une vieille dame moribonde » comme le dit si bien Nicole Bouin dans la conclusion de son compte-rendu dans la Rubrique "Nous avons lu pour vous" des Cahiers pédagogiques .

* Rubrique "Nous avons lu pour vous " des Cahiers Pédagogiques, 7 Décembre 2018.

189 - "Si l’on veut permettre à un être humain d’être reconnu comme une personne, il faut lui donner les moyens pour qu’il y parvienne"

Je publie aujourd'hui un autre texte, déjà ancien, extrait de mon fond documentaire personnel. Un de ces textes qui ont nourri ma "...