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lundi 24 décembre 2018

137.Tout savoir sur une formation en gestion mentale en Lycée


La gestion mentale connaît actuellement un regain de popularité et de visibilité par sa convergence de plus en plus évidente avec les apports les plus récents des recherches en neurosciences cognitives. Certains livres ou articles de chercheurs sont écrits avec des termes qui frôlent le plagiat tellement ils sont proches d’une partie de la terminologie patiemment élaborée par Antoine de la Garanderie... sans que jamais il ne soit cité.... Ainsi,  Jean-Philippe Lachaux utilise-t-il, dans "Cerveau et psycho" de décembre 2018 (voir message 135), un vocabulaire très proche du nôtre en soulignant " le rôle fondamental de l’intention de l’enfant (que l'on doit inciter) à verbaliser ce qu’il s’apprête à faire avant d’aborder l’activité". Il précise même l'importance de l’interaction pédagogique du professeur ou de l'accompagnateur avec l’élève, destinée à lui faire valoir qu’il a à sa disposition tout un arsenal "dans sa tête" qui lui permet de :
  • utiliser des "gestes mentaux"(sic) qui lui réussissent dans la vraie vie, et (...) de les reconnaître dans d’autres situations, pour les utiliser notamment dans la résolution d'un problème de géométrie  (mais sans préciser la structure de ces "gestes"),
  • prendre l’habitude de produire des images mentales internes (mais sans préciser la nature de ces "images" qui peuvent être aussi bien visuelles, auditives ou verbales, tactiles, gustatives, etc...), 
  • convertir des mots lus en produisant des images mentales internes
Un vrai dialogue pédagogique  ! 

« Toutefois, ce type d’interaction avec l’enfant n’est possible qu’avec des enseignants et des formateurs ayant eux-mêmes acquis une culture métacognitive, et l’un des grands apports des neurosciences cognitives dans le domaine de l’éducation sera sans doute de leur apporter cette culture. »
Tout ceci est bien joliment dit, et si modernement !,  mais les neurosciences sont encore loin d’avoir élaboré les moyens d’apporter cette culture métacognitive aux enseignants, ce que fait la gestion mentale depuis plus de 40 ans… dans l’ombre et désormais loin des médias simplificateurs.

Pour étayer cette idée, je mets en ligne aujourd’hui  (et avec la permission de la formatrice) une émission de RCF Côte d’Azur dans laquelle sont détaillées très précisément toutes les facettes d’une formation en Gestion Mentale donnée par Joëlle Murgia en 2017 dans un Lycée professionnel public de cette douce région. Pour la commodité de l’écoute, j’ai découpé l’émission en plusieurs passages, selon les thèmes abordés et en excluant musiques et autres intermèdes. On peut les choisir en fonction de son intérêt premier, mais l’ensemble est à écouter car chaque morceau complète les précédents.


On peut entendre l'émission intégrale sur le site de RCF (il y a deux séquences).

vendredi 9 février 2018

116 - Léane a eu "le déclic". Ou le salut par la réflexion.

Entretien avec Léane.

Léane est en 1° STSS. C’est une jeune fille sérieuse qui travaille beaucoup et souhaite réussir. Mais elle n’obtient pas les résultats espérés et à la hauteur de son investissement. Elle sait beaucoup de choses, qu’elle comprend assez bien, mais le jour du contrôle elle ne sait plus quoi faire et tout se bloque. Et elle se désole. Tout le monde autour d’elle s’affole, et son orientation comme son maintien dans l’établissement sont même remis en question.

Après avoir précisé le contrat de notre entretien (pas de miracle, rien de secret ni de personnel, nécessaire sincérité des réponses, etc.) j’ai proposé à Léane de remplir le Q-sort (questionnaire sur les "croyances" relativement à l'école) que j’utilise dorénavant en début de toute nouvelle rencontre. Immédiatement le problème de Léane est apparu, encore plus clairement que je ne m’y attendais. Voici ce qu'il en ressort. Pendant un cours, elle a une attitude relativement active et juste, bien qu'imparfaite (ce qui confirme le diagnostic de ses professeurs : elle comprend généralement assez bien en cours mais elle ne sait pas réutiliser en contrôle, il lui manque comme un « déclic »…). Lorsqu’elle apprend un cours son projet reste très flou, formé de plates généralités ; elle n’a pas de projet particulier quant aux réutilisations futures de ce qu’elle apprend. Et surtout, le nœud du problème se situe en contrôle : ce qu’elle essaye de faire c’est, à égalité d’intensité
•             « prouver que j’ai travaillé en mettant tout ce que je sais sur le sujet »
•             « résoudre un problème en utilisant mes connaissances ».


L'important n'est pas que je comprenne son problème, mais qu'elle-même soit en mesure d'en prendre conscience, ce qui est la première étape, incontournable, à toute vraie remédiation. 

Léane a donc compris sa difficulté, qui peut s’énoncer ainsi : une hésitation entre la simple restitution de ses connaissances, ce qu'elle fait depuis toujours ("montrer que j'ai travaillé") et leur réutilisation réflexive, plus complexe, mais dont elle ne connaît pas les mécanismes (Voir message 82 :"Restituer ou réutiliser ses connaissances"). Cette hésitation entre deux buts aussi opposés explique son trouble de projection lors de l’apprentissage de ses cours : elle ne sait pas trop à quoi les destiner et remplit ce vide angoissant par des idées toutes faites et sans contenu opérationnel (comment fait-on concrètement pour "avoir de la culture générale" ?). Ne reste plus alors qu’une compréhension spontanée, a minima, signe d’une intelligence à l’œuvre, ce dont par ailleurs personne ne doutait, mais dont on sait aussi qu’elle ne suffit plus à ce niveau d’études. Intelligence du reste qui, en tout cas,  ne fait jamais l’objet des évaluations scolaires !

J’ai donc consacré le reste de l’entretien à la découverte de l’acte de réflexion (l'outil du transfert des connaissances, voir "Pour apprendre à réfléchir") puis à une meilleure compréhension des cours en utilisant les "Cinq questions"(préparation du transfert, voir message 56, "Comprendre et réutiliser ses connaissances".).

Une remarque faite incidemment par Léane nous a fait comprendre pourquoi elle était si sensible aux changements de professeurs. Cette année, l’enseignant de mathématiques lui plait plus que celui de l’année dernière. L’ancien faisait beaucoup d’exercices en les commentant en même temps qu'elle écrivait au tableau. Le nouveau écrit au tableau, puis explique dans un deuxième temps. Léane a besoin d’évocations visuelles comme toile de fond de sa compréhension verbalisante. Si elle doit fabriquer ces images en temps réel  uniquement sur des explications orales, l’effort est trop grand. Si un support perceptif visuel lui est fourni avant les explications, sa compréhension  va pouvoir se développer beaucoup plus aisément. Elle peut « photographier » mentalement ce qui lui est montré et intégrer ensuite les explications du professeur. Sa verbalisation intérieure peut alors s’activer sans "perdre de vue" ce qu’elle essaye de comprendre. Du coup elle "aime" bien ce professeur si facilitant pour elle ! Ne jamais confondre cause et conséquence. Ni affectif et cognitif.

J’étais inquiet des résultats de notre rencontre. Léane ayant un bac blanc dans la semaine suivante, j’attendais impatiemment les résultats de ce qu’elle avait paru comprendre et apprécier avec moi.  Je craignais que ce soit encore trop frais dans sa tête pour quelle puisse mettre en pratique une méthode si éloignée de ses (mauvaises…) habitudes installées en elle depuis si longtemps.

Je n’ai pas été déçu : 14 en maths et en physique, 16,5 en biologie. Seul le Français a posé problème encore. Nous y reviendrons lors d’une future rencontre. Bien sûr, notre entretien ne suffit pas à lui seul à expliquer ces heureux résultats. Les connaissances mobilisées par Léane dans ses réflexions étaient bien présentes, et c'était de son seul fait. Et elle seule était à la manœuvre pour les trier correctement. Mais la connaissance des étapes d'analyse et de problématisation du geste de réflexion a été décisive pour lui donner confiance en elle et chasser son stress habituel, en lui permettant de voir plus clairement ce qu'on attendait d'elle dans cette situation.

A l’heure où ne jure plus que par les « neurosciences », plus ou moins bien assimilées, pour sauver notre Ecole à la dérive, un peu de bon sens et de simple gestion mentale ne suffirait-il pas à réconcilier de nombreux élèves avec la « chose » scolaire  et leur réouvir les voies de leur réussite ?

dimanche 23 décembre 2012

60 - Dialogue pédagogique avec un lycéen : le sens de l'écriture et de la lecture

Les relations de ce type de dialogue avec des adolescents entrant au lycée, ou qui y sont déjà bien engagés, ne sont pas très nombreuses. Je livre à mes lecteurs ce bref résumé d’une rencontre récente avec un des ces jeunes qui n’ont pas bien compris ce qu’on attend d’eux et qui s’efforcent si maladroitement  de faire ce qu’ils croient devoir faire… pour des résultats bien décevants, pour tout le monde.

Maxime  est élève de seconde générale. Je le rencontre pour la première fois. Il vient pour tenter de résoudre des difficultés d'expression écrite et de lecture d'énoncés. Il s'exprime facilement à l'oral mais se trouve très démuni à l'écrit. Il a de mauvais résultats, particulièrement en histoire, matière pour laquelle il a pris des cours particuliers avec un professeur qui me connaît, et qui me l'a envoyé pour trouver une solution à son « problème de méthode de travail ».

Maxime précise qu'il apprend facilement ses cours « par cœur » en les répétant plusieurs fois : il les sait bien mais il ne les comprend pas toujours… et les oublie aussi vite qu’il les a appris. Il ne lit pas beaucoup, sauf ce qui est imposé par l'école. Il lui arrive de lire des pages entières et de se rendre compte qu'il n'a rien compris de ce qu’il vient de lire. Toutefois, il lit régulièrement l'hebdomadaire « Courrier international ». Je demande si, dans ce cas, il comprend ce qu'il lit : oui, il  s’entend dire les mots « dans sa tête » et en garde une trace assez précise, il voit certains mots s'écrire comme sur une feuille blanche, ou alors il conserve une image assez précise de la forme générale du texte, dans laquelle il peut retrouver certains mots plus lisibles alors que les autres sont flous. Avec ces mots qui se sont imprimés dans sa tête sans qu'il ne l’ait clairement voulu, il essaie de constituer un sens. C'est de cette façon que généralement il travaille.

Pour préciser cette première approche, je lui propose de lire comme il le fait d'habitude le premier paragraphe du texte « Une importante découverte » tiré de l'ouvrage de Jacques Lacretelle : « Silbermann ». Dans ce texte l’auteur raconte sa première rencontre avec les évocations concrètes à partir d‘un texte littéraire intelligemment récité par l’un de ses camarades. Cette lecture lui prend un temps qui me paraît assez long. Ayant terminé, je lui demande de me dire ce qu'il a lu : sa compréhension est superficielle et incomplète. Il me dit qu'il a lu deux fois le texte, ce qui explique le temps qu'il a mis.

Je n'oublie pas sa demande initiale de méthode pour lire des énoncés. Je lui précise alors ce que l'on met sous le mot « projet » : l'intention que nous mettons en œuvre dans une action et qui dirige notre activité mentale dans un sens bien précis. Puis je lui explique la différence de projet entre une première lecture de compréhension (évoquer à partir du texte), et une lecture de vérification (comparer ses évoqués avec le texte : similitudes-différences-manques). Je lui propose ensuite de procéder à une relecture du même paragraphe pour s’assurer par lui-même de la justesse de sa première compréhension en comparant ses premières évocations (les mots qu'il voit dans sa tête) avec ce que le texte dit en réalité. Il se rend compte alors qu'il a "zappé" un certain nombre de détails qui lui permettent maintenant une compréhension un peu plus approfondie et plus précise du texte. Je lui demande alors ce qu'il a dans sa tête à propos de ce texte : ce sont toujours des mots, le texte lui-même est comme "photographié" avec maintenant davantage de mots lisibles mentalement.

Je parle alors à Maxime du sens de la lecture : l'auteur a traduit par des mots (ici, écrits) ce qu’il avait "dans sa tête" : des scènes, des actions, des personnages,  ou des idées…. C'est ainsi que les humains opèrent lorsqu'ils veulent communiquer leurs pensées aussi bien par oral que par écrit. Le rôle du lecteur est alors de retrouver dans sa propre tête, à sa manière,  les mêmes scènes, actions, personnages ou les mêmes idées à partir des mots écrits qu'il est en train de lire. Je lui demande si c'est le cas dans le travail qu'il vient de faire dans ses lectures successives. Il convient qu’il n'a peut-être pas été jusque-là.

Hypothèse. Je constate que Maxime utilise pour sa lecture un fonctionnement verbal de reproduction (P2), prolongé par les évocations visuelles de mots (P2). Est-ce là son  fonctionnement naturel ? Je veux tester sa capacité à utiliser aussi des évocations visuelles concrètes (P1) ou une verbalisation plus personnelle (P3-P4).

 Je lui demande s'il pratique une activité en dehors de l'école : oui, il joue au tennis. Qu'a-t-il appris dernièrement ? Avec son professeur il a travaillé "la volée". Je lui demande de me décrire ce qu'est une volée. Il décrit le geste avec précision. Je lui demande de décrire son évocation du geste : il en a une image très précise, comme un film avec du mouvement et il est lui-même en scène, et il se commente la position de la raquette.

Je lui demande ensuite s'il y a des matières qu'il aime plus que d'autres ou dans lesquelles il réussit habituellement au lycée. Oui, il aime bien l'économie qui est une matière nouvelle de cette année. Je dresse l'oreille à cette précision de la nouveauté : peut-être utilise-il pour cette discipline récente un fonctionnement différent de ses vieilles habitudes peu efficaces ? Je lui demande de retrouver un élément récent qu'il a appris en économie. Il me parle de la notion de "revenu des ménages". Après qu'il m’a précisé de quoi il s'agit, je lui demande comment il fait actuellement pour se souvenir de cette définition. Il me dit qu'il a dans sa tête l'image d'une maison dans laquelle deux personnes sont en train de remplir une déclaration d'impôts avec leurs bulletins de salaire sur la table. Cette image est très nette et elle porte en elle le sens de la définition qu'il m'a donnée et expliquée avec des mots qui sont les siens plutôt que ceux d'une définition apprise par cœur.

Je lui fais remarquer la différence qu'il y a entre ce souvenir (évocations verbales de paramètres 3 sur évocation visuelle de paramètres 1), et ce qu'il m'a dit précédemment de la manière dont il lit ou étudie ses cours (évocations verbales ou visuelles exclusivement de paramètres 2). Il convient que dans les deux derniers cas le sport et l'économie, il utilise spontanément des images visuelles et concrètes sur lesquelles il se parle à lui-même, ce qu’il ne fait pas pour les autres matières.

Hypothèse vérifiée. Il semble donc que le fonctionnement habituel de Maxime soit verbalo-visuel, avec mélange de paramètres 1 et 3. Mais il ne l’utilise pas pour sa compréhension des contenus scolaires… sauf en économie. Il a développé par ailleurs une bonne habitude de paramètre 2 qu’il pourrait continuer à utiliser dans un projet de pure mémorisation "mot pour mot" (poème, théâtre, définitions et règles, théorèmes...).

Je laisse provisoirement de côté ce constat avec l'intention d'y revenir un peu plus tard. Je lui demande comment il s'y prend dans d'autres disciplines ? Il me dit qu'en mathématiques il revoit assez facilement les schémas du professeur. Je note cette indication sans approfondir davantage. Je demande aussi comment ça se passe en contrôle : c'est justement là qu'il a des difficultés, le professeur donnant des exercices qui ne ressemblent pas à ceux qu'il a faits pour se préparer et qu'il s'est efforcé de mémoriser fidèlement (toujours avec le paramètre 2…). Devant un énoncé, il cherche dans sa mémoire les exercices qui ressemblent le plus à ce qu'on lui demande ; il se dit par exemple : "tiens, cet énoncé ressemble à celui de l'exercice numéro 52".

Remarque. Ce mauvais projet de sens est courant : c’est lui qui amène les élèves à déformer les énoncés pour les faire "coller" avec le souvenir d’un exercice qui leur paraît proche. Si "ça ne colle pas" ils décrètent qu’ "il y a une erreur dans l’énoncé"…

 Je lui demande alors s’il est bien sûr que la demande de son professeur soit de refaire indéfiniment les mêmes exercices. Il paraît troublé par ma question mais convient assez vite que ce n'est probablement pas cela que le professeur attend. N'ayant pas le temps d'entrer dans la démarche de la réflexion lors de cette première rencontre, je me propose d’y revenir plus tard. Mais déjà ma question à semé les germes du doute dans l'esprit de Maxime et c'est ce que je cherchais. Il sera plus demandeur lorsque je lui proposerai de découvrir le geste de réflexion.

Revenant à la lecture, je propose alors à Maxime d'essayer de lire le texte qu'il a déjà lu mais cette fois en essayant de traduire les mots en images concrètes. Il termine sa lecture plus rapidement que je ne le pensais. Je crains qu'il ne soit pas arrivé jusqu'aux images. Tout au contraire, il me décrit très précisément les images qu'il a produites, images mobiles, précises, reflets fidèles de toutes les subtilités du texte, avec juste une difficulté à intégrer les éléments faisant implicitement référence à la guerre de Troie. Je l'aide à retrouver dans sa mémoire les souvenirs de cet épisode de l'histoire grecque, ce qu'il fait en retrouvant des bribes de son programme d’Histoire de cinquième, du moins le croit-il. Il se souvient vaguement de l'histoire du cheval… Mais, à l'exception de cette difficulté "culturelle", sa "lecture-cinéma" a parfaitement fonctionné. Je lui demande quand il a le mieux compris : avec cette lecture-ci ou bien avec les précédentes ? Sans hésiter, il constate qu'il a beaucoup mieux compris cette fois-ci.

Remarque. Nous nous trouvons devant un cas assez classique de "collage" à la forme du contenu scolaire : l'élève est comme "sidéré" par la forme extérieure de ce qu'il doit apprendre, il ne s'autorise pas à la transformer, à dépasser les mots pour se faire ses propres commentaires ou pour se donner les images qui correspondent, à aller au-delà de la mémorisation de la "photographie" des exercices particuliers. Son intelligence n'est pas investie dans ces actions. Lorsqu'on l'y invite, il découvre qu'il utilise alors d'autres fonctionnements plus naturels chez lui, et qui, eux, lui permettent d'investir ses potentialités, bien réelles mais ignorées.

Il y a eu bien d'autres choses importantes révélées par ce premier entretien : rapport défectueux aux règles, qu’il ne comprend pas et qu’il mémorise mal ; intérêt pour les schémas qu’il "visualise" aisément et fidèlement…. Je compte bien y revenir lors d'une prochaine rencontre. Je n'ai relaté ici que ce qui concernait le "faux fonctionnement" de Maxime, c'est-à-dire ce faux projet de sens concernant les "choses de l'école",  tel qu'il est malheureusement tellement fréquent chez nos élèves. D'où vient-il ? D'où vient cette conception trop étroite de "l’apprendre", de quelle histoire de la transmission des savoirs, de quel fantasme collectif, de quelle obscurité - soigneusement entretenue par l'Ecole - sur la réalité de l’activité de la conscience humaine, de l'esprit humain…? Il pourrait être intéressant de formuler des hypothèses sur les causes de ce phénomène. Mais cela nous éloignerait du cadre de ce que doit être un dialogue pédagogique : recherche des moyens habituellement utilisés par une personne dans ses activités réussies et d'une meilleure adaptation de ses fonctionnements naturels aux tâches - le plus souvent  d'ordre culturel et abstrait - dans lesquelles elle est en difficulté.

Les "pourquoi" de causalité des difficultés constatées (causes psychologiques, sociales, etc.) sont certes à mettre de coté dans ce type de travail ("l'époké", la mise entre parenthèse provisoire des phénoménologues pour isoler les seules phénomènes mentaux). En revanche, les "pour - quoi  faire", les "à quoi cela te sert de faire ceci ou cela" de finalité sont tout à fait bienvenus. Ils sont l’expression des projets de sens mis en œuvre par une personne. C’est cela qui fera l'objet des entretiens suivants, avec une meilleure connaissance des gestes mentaux à produire en fonction des tâches et des situations scolaires mieux comprises.

Remarque finale. Si une personne ne peut porter à sa conscience qu'une petite partie de son activité mentale, de son côté celui qui l'écoute ne peut entendre qu'une partie de ce qui est réellement dit. C'est la limite et la contrainte de notre position dans le dialogue pédagogique. Mais le peu que nous pouvons entendre de ce que la personne peut observer en elle et verbaliser lui permet déjà de s'ouvrir des horizons insoupçonnés sur "les moyens de son intelligence". À elle ensuite de se saisir de ces découvertes et de les intégrer dans le monde toujours mystérieux de son activité mentale, avec l'espoir que cela pourra lui procurer un peu plus "d'intelligence de ses moyens".

jeudi 29 septembre 2011

40 - Dialogue pédagogique avec un élève de primaire : orthographe, mémorisation, réflexion...

Malgré les apparences, je n'oublie pas mes lectrices et lecteurs assidus. Avant de partir pour Caen présenter notre Pégase en conférence inaugurale d'une semaine de formation de l'ensemble des professeurs-stagiaires de l'académie (première année d'enseignement après le concours), je mets en ligne ce dialogue pédagogique retrouvé dans mes archives. Le primaire n'est pas ma pratique habituelle (plutôt grand collégiens et lycéens ou étudiants). Toutefois, à l'issue d'une formation au Dialogue Pédagogique que j'avais animée à Bordeaux, une des participantes m'avait demandé de rencontrer un de ses élèves dont elle constatait l'intelligence très vive, mais qui était en échec dans certains apprentissages scolaires "de base". J'avais accepté, d'abord pour lui être agréable et lui rendre service, mais aussi parce que ce type d'élève (intelligent mais peu scolaire... cela vous rappelle-t-il quelque chose ?) m'émeut toujours : quelle souffrance pour eux et leur famille de voir ainsi leur intelligence être inopérante dans le lieu même où elle devrait s'exercer, s'épanouir, se développer... !

Je ne me souviens pas de la classe de cet élève, mais cela est de peu d'importance. On voit dans cet échange que la réflexion est un geste mental à l'oeuvre très tôt, qu'il n'est pas réservé à des âges plus avancés, même si plus tard il devient encore plus déterminant pour la réussite scolaire.

N'oubliez pas qu'il s'agit ici d'un exemple, pas d'un modèle. Bonne lecture.

Lire : Dialogue pédagogique avec Paul.

193. Notes de (re)lecture du livre "Les Profils pédagogiques - Discerner les aptitudes scolaires" d'Antoine de La Garanderie (1980)

  Fascinante actualité des premières intuitions d'un « enfant à besoin particulier » du siècle dernier… Pour préparer un podcast avec An...