lundi 18 juin 2012

58 - En route vers l'autonomie... Bilan d'année de la classe de méthodologie toulousaine.

L'année se termine avec l'arrivée des beaux jours ( ? )... Je viens de faire,avec les élèves et leurs professeurs, le bilan de cette année 2012 dans la classe de méthodologie toulousaine dont j'ai souvent parlé ici (elle regroupe des élèves jugés en difficulté, parfois sérieuse, à la fin du collège). Année difficile pour certains élèves, qui ont dû opérer une reconversion presque totale de leurs (mauvaises) habitudes de travail, mais dont tous sortent grandis, plus confiants, plus mûrs et heureux. Les orientations ont été facilitées par un accompagnement très attentif des "tuteurs" (chaque professeur prend en charge 3 ou 4 élèves et les rencontre régulièrement tout au long de l'année, notamment au moment des conseils de classe). Tous les élèves ont pu ainsi affiner leur projet d'avenir et sont satisfaits des décisions prises pour l'année prochaine. Il n'y a qu'un seul doublant, mais ses progrès en autonomie notamment à la maison, sont réels et son année de redoublement sera sûrement positive Et en prime, il n'a plus « la haine pour  l'école »…(voir message 49)

Je publie ce bilan sur mon blog  parce qu'il témoigne de ce que la gestion mentale peut accomplir lorsqu'on s'en donne vraiment les moyens : neuf journées de stage réparties dans l'année (avec le coût financier, les problèmes d'organisation pour l'équipe enseignante comme pour le reste de l'établissement, et, pour les élèves, une fatigue certaine lors de ces longues et intenses journées, jointe à l'inconfort d'une recomposition en profondeur de leur « culture scolaire »), une équipe de professeurs dûment formés, volontaires pour un tel accompagnement qui n'est pas toujours facile et qui  les déstabilise parfois au cours de l'année. Comme le dit un élève, il y a eu « des hauts et des bas » (pour tout le monde), mais la tonalité générale des bilans personnels, anonymes, dont je publie les extraits les plus significatifs, témoigne de la satisfaction générale pour ce qui est pour ces adolescents un véritable « passage initiatique » : leur accès à l'autonomie intellectuelle et affective est en bonne voie, et ils s'en montrent particulièrement réjouis. De son côté l'équipe enseignante est satisfaite du résultat obtenu… et oublie les difficultés et les moments de doute.

>>>>>  Lire le bilan.

Dans les propositions des élèves pour améliorer le projet de cette classe spéciale, on notera, plusieurs fois signalé, le regret que les contenus des stages, les méthodes nouvelles, certes dûment reprises pendant les heures d'accompagnement personnalisé, ne se retrouvent pas suffisamment pendant les cours eux-mêmes. À cela je vois plusieurs raisons.

D'une part, les enseignants constatent qu'avec ces élèves ils adoptent un rythme moins soutenu que dans leurs autres classes du même niveau. Ils aident les  élèves à pratiquer les réactivations évocatives en début et en fin de cours, il orientent l'activité attentionnelle vers les évocations individuelles, ils se soucient de satisfaire les différents projets de compréhension, ils proposent  des éléments facilitant les mises en projet de mémorisation, ils appellent régulièrement à une réflexion organisée... Toutes ces activités mentales ont été découvertes, "abstraites" et explicitées lors des stages, mais souvent hors du contexte précis des disciplines scolaires de ce niveau du lycée. Ces éléments pourraient donc ne pas être toujours bien reconnus par certains élèves, sous leur forme recontextualisée, au milieu d'autres exigences particulières liées aux épistémologies disciplinaires ? Il ne s'agit pas de "copier-coller" des exercices qui ont servi à la découverte des gestes mentaux pendant les stages, ce qui complique quelque peu le transfert par les jeunes de ce qu'ils ont acquis avec moi. Toutefois on notera que les résultats très nettement améliorés dans les contrôles "lourds", identiques dans toutes les classes de seconde, prouvent bien que ce transfert de compétences a  commencé : peut-être en partie à l'insu des élèves eux-mêmes ? Les témoignages des anciens montrent bien qu'il se poursuit les années suivantes, jusqu'aux études supérieures... Patience, donc !

D'autre part,  malgré tout (leur bonne volonté, la formation que j'ai pu assurer auprès d'eux, leur réflexion personnelle et, désormais, leur expérience) les professeurs restent  "corsetés" par des programmes dont la densité et la quantité ne leur laisse que peu d'initiative et de temps pour modifier substantiellement leurs propres méthodes de travail. Et sans doute aussi sont-ils victimes de la représentation traditionnelle de "l'enseignant source de tout savoir", et éprouvent-ils quelques difficultés à aller jusqu'au bout de leur changement de posture. C'est un fait, il s'appliquent à enseigner "avec" la gestion mentale et ses apports : pratique de l'évocation, reconnaissance des projets de sens, connaissance des gestes mentaux, accompagnement de l'autonomisation des élèves. Ainsi, c'est vrai,  ils  "apprennent" mieux à leurs élèves. Mais ils hésitent encore, et le cadre institutionnel ne les y aide pas vraiment,  à franchir le pas et à accepter de "laisser leurs élèves apprendre" par eux-mêmes, c'est-à-dire d'enseigner "par" la gestion mentale de leurs élèves (voir plus bas *). Je conviens que c'est là une chose très difficile, très déroutante, très déstabilisante. Mais à terme c'est sûrement la formation la plus conforme aux besoins d'une société en changement profond et accéléré. La vraie formation intellectuelle des jeunes d'aujourd'hui n'est-elle pas de leur donner les moyens d'apprendre par eux-mêmes chaque fois qu'ils en auront nécessité pour une meilleure adaptation au monde qui sera le leur ? Et cela commence avant la vie professionnelle : particulièrement au lycée. Pour les enseignants, il s'agit là d'une véritable "révolution culturelle". Il ne serait pas honnête de leur reprocher de ne pas l'accomplir en totalité, sans être assurés d'y être accompagnés positivement par les autres acteurs  (familles, direction, collègues, inspecteurs…), ce qui est encore loin d'être le cas, tant cette conception de l'enseignement est éloignée des standards sur l'Ecole. Tout au moins en France et aujourd'hui…

* J'ai développé un peu plus cet aspect de la formation en Gestion mentale, à partir de deux extraits d'Heidegger dans un article pour la dernière Lettre de la Fédération Initiative et Formation, sur le thème "Enseigner avec la gestion mentale". Voir message 61.

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