La confiance et
l’estime de soi ne peuvent venir que de l’intérieur d’une personne.
On sait l’importance de la confiance en
soi, qu’on appelle aussi estime de soi, dans l’engagement des élèves au
travail, dans leur motivation, et dans la réussite de leurs apprentissages.
Mais ce que l’on sait moins c’est comment les aider à développer cette
confiance en eux-mêmes.
Certains pensent, à juste titre, que la réussite
et son cercle vertueux est favorable à son développement. Toutefois, je vois passer
beaucoup de propositions pédagogiques prétendant aller dans ce sens, et je suis
frappé par l’extériorité de ces occasions de réussite
préconisées. Extériorité, au sens où tout procède des professeurs et des
situations ou des protocoles proposés aux élèves. Rien de ce qui pourrait venir
d’eux-mêmes et de leur intériorité. Il est bien certain que des professeurs
rébarbatifs, des remarques blessantes voir des brimades, un climat d’insécurité
ou de compétition forcenée dans la classe, tout comme des tâches impossibles à
réaliser ou bien trop faciles ne comportant aucun enjeu pour l’élève, toutes
ses situations sont moins propices à l’estime de soi que leurs contraires. Tout
cela, ma foi, est bien connu, même si tous les enseignants n’en font pas
toujours la démonstration. Mais surtout, n’est-ce pas là confondre la cause et
la conséquence ; la réussite considérée comme cause de la confiance en soi
plutôt que sa conséquence ?
Les accompagnateurs et les professeurs
pratiquant la gestion mentale savent que c’est toujours de l’intérieur même
des élèves que peut naître la confiance et l’estime de soi-même et, en
conséquence, la réussite. Un dialogue pédagogique bien mené, un renseignement
donné au bon moment sur le projet de sens ou le geste mental permettant la
réussite, voilà le meilleur moyen pour que la confiance et l’estime de lui-même
revienne dans le cœur d’un enfant. Voir à ce propos mes messages 72 et 163.
N’étant ni enseignant, ni psychologue ou
quelque chose comme ça, j’ai pourtant eu de très nombreuses occasions de
constater qu’en fort peu de temps et avec très peu de moyens pédagogiques, la
confiance d’un élève en ses capacités propres peut survenir et, devant les
preuves évidentes de réussite qu’elles lui permettent d’obtenir, s’installer
durablement. En voici un témoignage bien significatif que j’ai retrouvé dans
mes archives. Il date de 2003, époque où, après mon départ en retraite, je
recevais encore des élèves de tout niveau scolaire.
Il s’agit d’un mail reçu de sa maman après
seulement un entretien d’un peu plus d’une heure avec un jeune enfant :
« Monsieur,
depuis l’entretien que vous lui avez accordé, François-Xavier a découvert avec
délice ce qu’est la mémoire et le plaisir de s’en servir : il a (enfin !)
appris "ses tables" et s’est étonné de la facilité avec laquelle cela est
possible. Il a fait un bond gigantesque en orthographe se payant même le luxe
d’une excellente note à une dictée difficile, là où il aurait "autrefois"
hérité d’un zéro… Les acquisitions dans le domaine de la mémoire en général ont
considérablement progressé et François-Xavier a retrouvé une confiance en lui
perdue depuis longtemps. Il a même exprimé combien il était persuadé d’être
complètement "idiot" et commence à penser que ce n’est pas tout à fait vrai
».
Lors de ce premier entretien, je n’avais
abordé que la partie "facile"de Pégase : l’intégration et la conservation de
contenus scolaires. La "réception du ballon" en quelque sorte pour
reprendre la métaphore du footballeur *. Je n’avais pas abordé la suite que
j’avais laissée à son initiative, lui proposant d’aller plus loin s’il
le souhaitait et si les premiers résultats obtenus l’encourageaient à
poursuivre son effort de mise au jour de son potentiel mental. Aborder la
réflexion avec sa zone de turbulences et de risques demande en effet qu’une
solide base de confiance soit d’abord réinstallée.
Et en effet la maman poursuit son mail
ainsi :
« Mais dans un
même temps il a très peur que "ça ne dure pas". D’autant, et dans ce
domaine le problème reste entier, que la mise en place d’un commencement de
réflexion n’est pas faite. Nous buttons donc sur ce problème majeur même si
nous avons passé beaucoup de temps à lire et à analyser vos documents **. Il me
semble en conséquence utile que vous puissiez le revoir en entretien dans un
futur assez proche pour profiter de la dynamique créée par ses acquis en
mémorisation mais aussi pour éviter un découragement face aux mauvais résultats
de certains contrôles qui risquent de nous faire repartir sur les certitudes
relatives à la "nullité". »
Ainsi, il est vrai que la seule bonne
réception des savoirs (attention et mémorisation) n’est pas suffisante pour
assurer durablement la confiance en soi. Les gestes mentaux (les actes de
connaissance) de réflexion et de compréhension approfondie en sont les
compléments indispensables. Car c’est bien à ces moments de confrontation aux
tâches complexes de transfert des connaissances - que sont nos
"contrôles" en France - que se joue la plus grosse partie de la
confiance en soi et son installation dans le temps long. En conséquence, la
réception des savoirs doit viser dès le départ ces compétentes qui sont en
jeu dans nos évaluations. Ces évaluations qui en aucun cas ne peuvent à elles
seules provoquer la confiance et l’estime des élèves, alors qu’elles ne sont la
plupart du temps pour eux que source de stress et de dévalorisation
personnelle.
Les entretiens suivants avec
François-Xavier - comme avec tant d’autres - ont consisté à mettre en place ces
gestes mentaux plus complexes, jusque-là inconnus de lui et à les pratiquer
dans de bonnes conditions. Et la confiance s’installa en lui durablement.
Mais de l’intérieur ! Toujours.
* Voir page 7 du cahier J'apprends à travailler (Chronique
Sociale. 2018)
**Pour éviter de multiplier les
rendez-vous, je donnais aux grands élèves ou aux parents des plus jeunes le
document "réflexion élève" (voir mon message numéro 25 Pour apprendre à réfléchir).
Mais évidemment cela ne remplaçait pas, surtout pour les plus jeunes, un
entretien ciblé sur ce geste délicat. De la même façon je réservais un
entretien pour le geste de compréhension approfondie avec les cinqquestions (message 56).
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