jeudi 10 juin 2021

164 - La confiance et l’estime de soi ne peuvent venir que de l’intérieur d’une personne.

 

La confiance et l’estime de soi ne peuvent venir que de l’intérieur d’une personne.

On sait l’importance de la confiance en soi, qu’on appelle aussi estime de soi, dans l’engagement des élèves au travail, dans leur motivation, et dans la réussite de leurs apprentissages. Mais ce que l’on sait moins c’est comment les aider à développer cette confiance en eux-mêmes.

Certains pensent, à juste titre, que la réussite et son cercle vertueux est favorable à son développement. Toutefois, je vois passer beaucoup de propositions pédagogiques prétendant aller dans ce sens, et je suis frappé par l’extériorité de ces occasions de réussite préconisées. Extériorité, au sens où tout procède des professeurs et des situations ou des protocoles proposés aux élèves. Rien de ce qui pourrait venir d’eux-mêmes et de leur intériorité. Il est bien certain que des professeurs rébarbatifs, des remarques blessantes voir des brimades, un climat d’insécurité ou de compétition forcenée dans la classe, tout comme des tâches impossibles à réaliser ou bien trop faciles ne comportant aucun enjeu pour l’élève, toutes ses situations sont moins propices à l’estime de soi que leurs contraires. Tout cela, ma foi, est bien connu, même si tous les enseignants n’en font pas toujours la démonstration. Mais surtout, n’est-ce pas là confondre la cause et la conséquence ; la réussite considérée comme cause de la confiance en soi plutôt que sa conséquence ?

Les accompagnateurs et les professeurs pratiquant la gestion mentale savent que c’est toujours de l’intérieur même des élèves que peut naître la confiance et l’estime de soi-même et, en conséquence, la réussite. Un dialogue pédagogique bien mené, un renseignement donné au bon moment sur le projet de sens ou le geste mental permettant la réussite, voilà le meilleur moyen pour que la confiance et l’estime de lui-même revienne dans le cœur d’un enfant. Voir à ce propos mes messages 72 et 163.

N’étant ni enseignant, ni psychologue ou quelque chose comme ça, j’ai pourtant eu de très nombreuses occasions de constater qu’en fort peu de temps et avec très peu de moyens pédagogiques, la confiance d’un élève en ses capacités propres peut survenir et, devant les preuves évidentes de réussite qu’elles lui permettent d’obtenir, s’installer durablement. En voici un témoignage bien significatif que j’ai retrouvé dans mes archives. Il date de 2003, époque où, après mon départ en retraite, je recevais encore des élèves de tout niveau scolaire.

Il s’agit d’un mail reçu de sa maman après seulement un entretien d’un peu plus d’une heure avec un jeune enfant :

« Monsieur, depuis l’entretien que vous lui avez accordé, François-Xavier a découvert avec délice ce qu’est la mémoire et le plaisir de s’en servir : il a (enfin !) appris "ses tables" et s’est étonné de la facilité avec laquelle cela est possible. Il a fait un bond gigantesque en orthographe se payant même le luxe d’une excellente note à une dictée difficile, là où il aurait "autrefois" hérité d’un zéro… Les acquisitions dans le domaine de la mémoire en général ont considérablement progressé et François-Xavier a retrouvé une confiance en lui perdue depuis longtemps. Il a même exprimé combien il était persuadé d’être complètement "idiot" et commence à penser que ce n’est pas tout à fait vrai ».

Lors de ce premier entretien, je n’avais abordé que la partie "facile"de Pégase : l’intégration et la conservation de contenus scolaires. La "réception du ballon" en quelque sorte pour reprendre la métaphore du footballeur *. Je n’avais pas abordé la suite que j’avais laissée à son initiative, lui proposant d’aller plus loin s’il le souhaitait et si les premiers résultats obtenus l’encourageaient à poursuivre son effort de mise au jour de son potentiel mental. Aborder la réflexion avec sa zone de turbulences et de risques demande en effet qu’une solide base de confiance soit d’abord réinstallée.

Et en effet la maman poursuit son mail ainsi :

« Mais dans un même temps il a très peur que "ça ne dure pas". D’autant, et dans ce domaine le problème reste entier, que la mise en place d’un commencement de réflexion n’est pas faite. Nous buttons donc sur ce problème majeur même si nous avons passé beaucoup de temps à lire et à analyser vos documents **. Il me semble en conséquence utile que vous puissiez le revoir en entretien dans un futur assez proche pour profiter de la dynamique créée par ses acquis en mémorisation mais aussi pour éviter un découragement face aux mauvais résultats de certains contrôles qui risquent de nous faire repartir sur les certitudes relatives à la "nullité". »

Ainsi, il est vrai que la seule bonne réception des savoirs (attention et mémorisation) n’est pas suffisante pour assurer durablement la confiance en soi. Les gestes mentaux (les actes de connaissance) de réflexion et de compréhension approfondie en sont les compléments indispensables. Car c’est bien à ces moments de confrontation aux tâches complexes de transfert des connaissances - que sont nos "contrôles" en France - que se joue la plus grosse partie de la confiance en soi et son installation dans le temps long. En conséquence, la réception des savoirs doit viser dès le départ ces compétentes qui sont en jeu dans nos évaluations. Ces évaluations qui en aucun cas ne peuvent à elles seules provoquer la confiance et l’estime des élèves, alors qu’elles ne sont la plupart du temps pour eux que source de stress et de dévalorisation personnelle.

Les entretiens suivants avec François-Xavier - comme avec tant d’autres - ont consisté à mettre en place ces gestes mentaux plus complexes, jusque-là inconnus de lui et à les pratiquer dans de bonnes conditions. Et la confiance s’installa en lui durablement. Mais de l’intérieur ! Toujours.

 

* Voir page 7 du cahier J'apprends à travailler (Chronique Sociale. 2018)

**Pour éviter de multiplier les rendez-vous, je donnais aux grands élèves ou aux parents des plus jeunes le document "réflexion élève" (voir mon message numéro 25 Pour apprendre à réfléchir). Mais évidemment cela ne remplaçait pas, surtout pour les plus jeunes, un entretien ciblé sur ce geste délicat. De la même façon je réservais un entretien pour le geste de compréhension approfondie avec les cinqquestions (message 56).

 


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